Tout vu, tout lu, tout entendu. La Copa do mundo 2014 aura été scrutée, analysée, décortiquée en long, en large et en travers. Voire de travers pour une grande partie de la population brésilienne qui n’avait pas (et n’a toujours pas) avalé la pilule « Fifa », et même pour une autre grande frange (la même ? On ne sait plus. Mais plus visible en tout cas) de la population, après la déroute, la débâcle, le désastre, le « Mineiraço » (en référence au « Maracanaço » de 1950) etc. N’en jetez plus, cela a été commenté en long, en large et de travers, donc. J’aimerais plutôt évoquer ici l’autre facette du foot au Brésil, beaucoup moins médiatique que la Copa, qui soi-dit en passant est restée une belle fête du football avec ce qu’il faut de buts, de pots de gel, de bikinis et de cachaça (élément essentiel de la caïpirinha, avec un citron vert, du sucre de canne et de la glace pilée, il est toujours bon de le rappeler). C’est vrai ça, vous auriez pu penser que la Copa 2014 ne m’avait pas intéressé, alors qu’en réalité je n’en ai pas perdu un match, ni une goutte.

Revenons donc au sujet du jour ; l’autre (la vraie) facette du football au pays du futebol, c’est évidemment le foot pratiqué dans la rue, ou à la plage. Celui pratiqué tous les jours, des pelouses synthétiques des quartiers les plus chics aux terrains délimités à la craie des favelas. Caricatural ? Oui, sans doute. Surtout depuis que l’on sait que l’innovation la plus excitante depuis un certain temps pour les footballeurs du monde entier (les vrais, le gens comme vous et moi, pas les professionnels hein) nous vient tout droit des favelas. Un terrain éclairé grâce à l’énergie, à savoir les déplacements, des joueurs. Ce nouveau type d’illumination (divine), inauguré dans la favela de Mineira à Rio le 10 septembre dernier, fonctionne grâce à des plaques fabriquées en grande partie à partir de matériaux recyclés qui sont placées sous la nouvelle pelouse du terrain. L’éclairage de nuit est ainsi assurée à 100% par l’énergie générée par les courses des joueurs (avec les kilomètres parcourus par Olive et Tom, surtout Olive d’ailleurs, on serait tranquilles pour un bon moment) sachant que la lumière produite de jour est captée pour être ensuite diffusée la nuit. Fruit d’une initiative privée, en partenariat avec la mairie de Rio, ce nouveau type de terrain tout beau, tout écolo, doit symboliser le futur. Seulement il existe un problème pour les habitants de la favela, et de taille : il faut payer pour y accéder ! Aux alentours de 50 reais (environ 17 euros) par heure et par équipe. Les cariocas concernés l’auraient appris au moment de l’inauguration, qui comptait Pelé comme prestigieux invité, décidément jamais bien loin lorsque l’on parle dinheiro (comme l’avaient déjà souligné les Simpson au début de l’excellent épisode 5 de la saison 9, « Le Papa flingueur » ; j’arrête là les références à mes dessins animés préférés, promis).

Alors, fausse bonne idée ce terrain ? L’avenir nous le dira. En attendant, les habitants de Mineira vont jouer sur d’autres terres tandis que ceux qui utilisent la pelouse viennent d’ailleurs. Ou quand les tarifs à l’entrée incitent à la mixité sociale, on n’arrête pas le progrès ! Il serait en tout cas intéressant de généraliser (gratuitement pour les usagers) ce type de projet, avant de voir se multiplier, sur les terrains sevrés de lumière, les matchs à la lampe frontale (Radamel Falcão, plutôt bon joueur de tête, s’est dit opposé à l’idée) ou à la bougie aux bords du terrain, pour les adeptes du futebol romântico. Quoi qu’il arrive cela n’empêchera pas les brésiliens de taper la bola par tous les temps et sur tous les terrains. Le foot, le vrai ! A part ça, un petit Brésil-Argentine est prévu le 11 octobre prochain. Pas sûr que beaucoup d’énergie soit produite sur le terrain de Mineira pendant les 90 minutes du match.

…Et la lumière fut. (Photo AFP)