« Dans cette grandeur de la nature, dans le désordre de ses productions, dans cette fertilité sauvage qui se montre à côté de la fertilité de l’art, dans cet espoir que donne l’abondance de la terre, au mugissement des forêts primitives, au bruit des chutes d’eau qui se lancent de rocher en rocher, aux cris des animaux sauvages, qui semblent braver l’homme dans les déserts, la pensée des Brésiliens prend une énergie nouvelle »
Ferdinand Denis, Résumé de l’histoire littéraire du Brésil
« Fertilité de l’art » et « énergie nouvelle », voilà des mots clés qui pourraient bien condenser notre ressenti au Musée international d’Art Naïf Anatole Jakovsky de Nice, lors de notre visite du 11 juin dernier.
Jacques Ardies, galeriste à São Paulo depuis quarante ans et spécialiste de l’Art Naïf brésilien, nous a guidés à travers l’exposition « Fantaisies Brésiliennes », qui restera dans ce beau Musée niçois jusqu’au 3 octobre 2016.
Jacques Ardies et Filomena Iooss
Le voyage pictural entrepris nous a effectivement renvoyés avec bonheur à la notion de « fantaisie » en musique classique, cette forme composite qui s’oppose aux formes musicales strictes telles que la sonate…
Car un patchwork de couleurs parfois exubérantes et de motifs divers est mis en lumière dans les différentes salles, donnant à voir cette peinture innée ou instinctive traduisant « usages et habitudes », « traditions populaires », « comportements urbains et régionaux ». Tout cela, souligne le critique d’art Geraldo Edson de Andrade, « sans excès d’intellectualisme, à l’aide d’une vision simple de celui qui voit les choses pures de la vie, [e]n résumé, ses racines ».
Dans la lignée du Douanier Rousseau, qui reste un représentant majeur de l’art Naïf, et sous l’impulsion de la Semaine d’Art moderne de 1922 à São Paulo, le Naïf brésilien émerge dans les années quarante, se démarquant progressivement du courant européen.
Libres de règles académiques, ces artistes brésiliens, femmes et hommes issus de diverses couches sociales (souvent modestes, parfois aisées), ont su chacun d’eux développer et perfectionner dans le temps un style et une forme de singularité.
Crisaldo Morais, 1932-1997
Portrait d’Anatole Jakovsky (1976)
Chico da Silva 1910-1985
Poissons volants (1964)
Madeleine Colaço, 1907-2001
Anacardier et oiseaux des îles (1980), Tapisserie brodée
Multiples sont les peintres naïfs brésiliens vivants, dont le travail est remarquable : Helena Coelho, Cristiano Sidoti, Miranda, Rosina Becker de Valle, Luiz Cassemiro, Rodolfo Tamanini Neto, Ivonaldo Veloso de Melo, Ana Maria Dias, Mara Toledo, Vanice Ayres, Ernani Pavaneli, Edivaldo Barbosa, parmi tant d’autres.
Helena Coelho, « Remo na lagoa » (2010)
Rodolfo Tamanini Neto, « Futebol Society » – Football en société (2012)
Luiz Cassemiro, « Le char à boeufs » (2013)
Au nom de Brasil Azur, tous mes remerciements aux organisateurs de cette superbe exposition et à Jacques Ardies en particulier ! On découvre grâce à eux un art brésilien qui nous ressource. Car, comme le précise avec justesse Anne Devroye-Stilz, Conservateur en Chef du Musée International d’Art Naïf Anatole Jakovsky, il est issu du « besoin inextinguible de braver la dureté de la vie et lui substituer toutes les couleurs de l’espoir ».